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« Licorne », de Nora Sandor

En 2004, Mark Zuckerberg fondait Facebook. Il s’agissait alors simplement d’un trombinoscope universitaire.

Au fil des ans, Facebook, devenu un véritable réseau social mondial, prenant tellement d’ampleur que la concurrence a commencé à émerger de toute part. C’est ainsi que, six années après sa création, Instagram a fait son apparition. Dès lors, ce petit nouveau a révolutionné la communication numérique. Les filtres ont fait leur apparition. La quête d’abonnés est devenue virale. Il ne s’agissait alors plus seulement de partager son quotidien, mais de s’afficher sur son meilleur jour pour engranger le plus de « likes ». Instagram s’est alors imposé comme le lieu de tous les possibles, à portée de clic. Redéfinissant les notions de beauté et de communication, ce nouveau réseau social a pris une ampleur telle qu’il est devenu vecteur d’emploi. « L’influenceur » a fait son apparition. Cadrage, jeux de lumière, filtres, retouches, mais surtout « hashtag », hommes comme femmes, en quête de pouvoir et de célébrité, se sont mis à afficher, partager, conseiller leurs goûts, leurs astuces beauté, leurs entraînements physiques, leurs tenues vestimentaires. L’ère du numérique voyait l’émergence d’un nouveau « rêve américain », constitué de strass et paillettes.

De nombreux individus de tous horizons, de tous âges et de tous sexes se sont alors mis à réclamer leur part du gâteau, leur quart d’heure de gloire.

Maëla, l’héroïne de « Licorne », appartient à cette génération qui est convaincue qu’il est indispensable de percer sur la toile. Quel que soit le prix à payer, quels que soient les risques à prendre, les sacrifices à s’infliger. Elle rêve de devenir blogueuse beauté, ne compte, pour l’instant que 24 abonnés, n’éprouve que peu d’intérêt pour la fac de Lettres dans laquelle elle est inscrite, et a été abandonnée par son amoureux, Killian, par écrans interposés. Elle occupe un poste barbant au Carrefour City du coin, mais Maëla a de grands espoirs. Et, nous l’avons dit : sur Instagram, l’impossible devient accessible. Du jour au lendemain, miss_maela_98 explose sur les réseaux sociaux. « Le jour de gloire est arrivé ».

À coups de crédits à la consommation, de perches à selfies et de rencontres influentes, Maëla acquiert la notoriété tant espérée. Mais Maëla le sait, toute cette gloire est factice, créée de toute pièce. Elle a conscience de l’inutilité de cette cause, autant que de son caractère éphémère et illusoire. Surtout, maintenant qu’elle a atteint son rêve, est-elle toujours convaincue d’avoir trouvé ce qu’elle cherchait vraiment ?

« Licorne » se révèle être un premier roman parfaitement ancré dans son monde. Terrifiant de justesse et de vérités, il nous fait nous interroger sur notre propre utilisation des réseaux sociaux, et sur l’ère du 2.0 de manière générale.

Un ton enlevé et une héroïne désabusée, pour représenter une génération en perte de réalité et de repères solides.

Glaçant et tendre à la fois, « Licorne » s’affiche sans conteste comme une fable moderne, sans jamais tomber dans le côté moralisateur. À mettre dans toutes les mains, et de toute urgence ! ! !


(

, éditions Gallimard – 212 pages – 18 EUR)

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